L'ouverture de Noemi : quelles conséquences sur les données diffusées ?
Au début du mois de juin 2026, la Bibliothèque nationale de France change d'outil de catalogage. À compter de cette date, ses équipes produiront dans ce nouvel outil, appelé Noemi, des notices conformes au code RDA-FR (donc au modèle IFLA LRM) dans un nouveau format propre à la BnF : Intermarc-NG, résultant de l’adaptation au modèle entité-relation LRM et au code de catalogage RDA-FR de son actuel format propriétaire Intermarc. Ce changement d'outil va bien sûr avoir des effets sur les données, les interfaces et les services, dès le début des travaux de migration des données de l'ancien catalogue fin avril, et jusqu'à la fin de l'année 2026.
Calendrier du déploiement et effets sur les services
Avril 2026 : début du déploiement
Un mois avant l'ouverture officielle de Noemi, le travail de migration des données du catalogue actuel vers la nouvelle base commencent. Il s'agit de transformer les notices bibliographiques et d'autorité actuelles en notices d'entité, à clusteriser ensemble les notices potentiellement produites en double (oeuvres et expressions), et à convertir les données depuis le format Intermarc vers le format Intermarc NG. Pendant ce temps, la production de notices est à l’arrêt, à l'exception de notices élémentaires créées dans le cadre de certaines chaînes d'entrée, et qui seront traitées dans un second temps, juste avant l'ouverture.
Lors de cette période, les interfaces de consultation (Catalogue général, Gallica, data.bnf.fr...) et les services de récupération (Z39.50, SRU...) restent opérationnels, mais ne seront donc alimentés par aucune nouvelle notice. En raison de l'absence de notices produites, aucun produit, courant ou spécifique, ne sera créé, et la Bibliographie nationale française interrompra ses publications. Enfin, plusieurs services seront mis à l'arrêt, en particulier les demandes d'attribution d'ISNI (International Standard Name Identifier), et le traitement par le Centre national RAMEAU (CNR) des demandes reçues au FNPR (Fichier national des propositions RAMEAU).
Juin 2026 : ouverture de Noemi
À l'ouverture de Noemi, la production et la modification de données pourra reprendre dans le nouvel outil. Les équipes travailleront désormais sur des notices d'entités en Intermarc NG. Pendant cette période, interfaces et services resteront opérationnels ; de nouvelles notices et des modifications sur des notices existantes seront de nouveau disponibles. Les demandes d'attribution d'ISNI pourront reprendre ; en revanche les demandes reçues au FNPR resteront en attente encore quelques temps, afin de permettre aux équipes du CNR de mener les chantiers de reprise prioritaires.
2e semestre 2026 : Stabilisation
La période suivante sera celle de la stabilisation autour du nouvel outil, avec la remise en marche progressive des services interrompus, au fil de leur branchement sur le nouveau catalogue. Les produits bibliographiques ainsi que les publications de la Bibliographie nationale française reprendront dans un délai de deux à trois mois, et le FNPR début octobre.
Les nouvelles notices et notices modifiées continueront d'être mises à disposition au fil de l'eau par le biais des interfaces et services de récupération, et des chantiers ponctuels de mise à jour des données seront susceptibles d'avoir lieu jusqu'à une mise en cohérence complète des données diffusées avec la base Noemi, dans le courant de l'année 2027.
Produire les données diffusées
Modalités de production des données après juin 2026
Noemi change la façon dont la BnF produit les données qu'elle diffuse. Avant juin 2026, les notices bibliographiques et d’autorité sont produites et stockées en Intermarc de la base catalogue actuelle, puis versées dans un réservoir XML, sans conversion. Elles peuvent ensuite faire l'objet de traitements et de conversion pour être diffusées, par exemple en Unimarc.
A compter du 1er juin, les données du catalogue seront entièrement converties en Intermarc NG, et structurées en notices d'entités dans la nouvelle base, celle de Noemi ; c'est également ainsi qu'elles seront désormais produites par les catalogueurs. En revanche, dans un premier temps du moins, elles ne seront diffusées que dans le format et la structuration antérieurs, à savoir sous forme de notices bibliographiques et d'autorité classiques, dans tous les formats de diffusion antérieurs (Intermarc, UNIMARC, Dublin Core...). Dans l’attente d’une conversion directe des données en Intermarc NG vers ces formats de diffusion, une migration retour des notices vers le format Intermarc sera effectuée pour alimenter le réservoir XML., qui servira toujours de base pour la production des données diffusées, selon les modalités antérieures, avec éventuellement des adaptations mineures.
Cette alimentation aura d'abord lieu uniquement au fil de l’eau, c’est-à-dire lorsqu’un catalogueur aura créé ou modifié quelque chose dans l'outil Noemi. Cela signifie que les transformations et nettoyages de données effectués lors de l’opération de migration ne seront pas immédiatement répercutés dans les données fournies par la BnF : cela se fera progressivement par la suite, par chantiers successifs, jusqu’à assurer une cohérence parfaite entre Noemi et le réservoir XML de données. A terme, les services de mise à disposition de données (interfaces, services de récupération produits…) seront branchés directement sur la base Noemi, mais cette opération prendra sans doute encore quelques années.
Recréer des notices classiques à partir de notices d’entités
Cas simple : notice ayant un équivalent 1 à 1
C’est le cas majoritaire pour les autorités. La notice d’entité a le même contour que la notice d’autorité équivalente. Lors du passage à Noemi, une notice d’autorité a généralement et transformée en une notice d’entité, et au retour, elle redevient une notice d’autorité (PEP>IPP>PEP).
La seule subtilité vient du fait qu’à la migration, des travaux de nettoyage ou de transformation ont pu être menés pour améliorer le catalogue, qui font qu’une notice d’autorité actuelle pourra être amenée, exceptionnellement, à changer de nature. (RAM 161 (ORG)>Concept>RAM 166 (MAT). C’est un cas marginal ; il concerne essentiellement des notices de RAMEAU, transformées dans le cadre de la Réforme RAMEAU – nous y reviendrons un peu plus loin.
Cas faussement simple : les œuvres
Deux logiques différentes pour les autorités titres et les œuvres, même si globalement il s’agit d’une équivalence 1:1. Que faire à la migration retour ? Créer beaucoup plus d’autorités titre, puisque plus de distinction possible entre œuvres « choisies » ou non. En revanche, certains cas posent problème : par exemple, les œuvres de type monétaire. Non systématique au début, mais transition progressive vers du systématique, avec à charge pour les utilisateurs de tout récupérer ou non selon leurs besoins et leur logique. Cela signifie en tous cas que certaines notices d’entité de Noemi seront, au moins dans un premier temps exclues du retour, et n’apparaîtront pas dans le catalogue et les possibilités de récupération.
Cas complexe : notices sans équivalent 1 à 1
La manifestation déclenche la création de la notice bibliographique, mais pour alimenter cette dernière, il est nécessaire de récupérer des informations depuis plusieurs niveaux d’arbres qui peuvent être simples comme très complexes. Cela permet de se poser la question du grappage à la conversion retour.
Grappage et déclenchement
Lorsqu’une notice d’entité (hors cas particulier des œuvres et des expressions) est modifiée, elle est repérée comme devant passer par le processus de migration retour, au cours duquel elle créera ou mettra à jour la notice classique à laquelle elle correspond. C'est ce qu'on appelle le déclenchement.
Ce processus est moins simple qu’il n’y paraît car pour garantir la cohérence des données classiques du réservoir XML, il faut également prendre en compte l’impact potentiel de chaque modification de notice sur d’autres notices : ce qu'on appelle le grappage (ou les cascades).
Pour les cas simples, il s'agit principalement de vérifier si le point d'accès autorisé d'une entité a été modifié. Dans ce cas les entités liées à celle-ci doivent également repasser par la migration retour, pour que le changement de point d'accès soit répercuté dans la zone de lien des notices liées.
Le cas le plus complexe est celui des œuvres, des expressions et des items. Dans le cas des expressions, il n’existe pas de notice classique équivalente à recréer. En revanche, si un expression est modifiée dans Noemi, la ou les notices bibliographiques correspondant aux manifestations qui lui sont liées dans un arbre passeront à la migration retour, et seront mises à jour. Pour les items, la notice bibliographique liée sera mis à jour, en sus de la partie d’exemplaire concernée. Enfin les œuvres, qu’elles donnent ou non lieu à la création ou à la mise à jour d’une autorité titre, conduiront également à la mise à jour de la ou des notices bibliographiques correspondant aux manifestations qui leur sont liées au sein d’un arbre – et aussi à la mise à jour des autres entités qui leur sont liées si leur point d'accès autorisé a été modifié. Cela peut conduire à beaucoup de notices modifiées d’un coup dans le catalogue traditionnel pour une seule entité touchée dans Noemi.
Les effets dans les notices et les données
La migration des données de la BnF dans Noemi est l’occasion de mener quelques opérations de nettoyage, d’harmonisation et de transformation des données issues du catalogue actuel. Cela peut avoir un impact à deux niveaux : sur la nature même des notices, et sur certains éléments de leur contenu.
Des notices qui changent de nature
Les notices qui vont être amenées à changer de nature sont essentiellement des notices d'autorité concernées par la réforme RAMEAU. EN effet, un des objectifs de cette réforme est de sortir du répertoire RAMEAU toutes les entités qui ne sont pas des concepts au sens d'IFLA-LRM et RDA-FR. Cela constitue une mise en cohérence par rapport à la situation actuelle, où tous les types notices d’autorité peuvent faire ou non partie du référentiel RAMEAU. Par ailleurs, le déploiement de Noemi est également l’occasion de tenter d’harmoniser les points d'accès et le contenu des notices pour qu’ils soient conformes à RDA-FR, au moins pour leurs éléments fondamentaux.
Parmi les notices appartenant actuellement à RAMEAU ; une grande majorité (71%) ne connaîtront au moment de la migration des données dans Noemi aucun changement de nature, même si elles pourront être amenées à sortir du répertoire – c’est par exemple le cas des notices d’autorité nom de personne ou de collectivité. Une très petite proportion (2% soit 3319 notices) changeront de nature, pour arriver à un état satisfaisant du point de vue de la réforme RAMEAU. Elles feront l’objet d’un produit d’accompagnement d’ici à la fin de l’année 2026. Environ 21% de l’ensemble ne seront pas modifiées au moment du déploiement, seront amenées à le faire lors d’étapes ultérieures. Enfin, 6% (13577 notices) subiront des changements, sans pour autant atteindre déjà leur état définitif.
Concrètement, à l’ouverture de Noemi, rien ne changera immédiatement : les notices seront modifiées au fil des reprises manuelles ou des chantiers effectués par le Centre national RAMEAU. Les notices ayant changé de statut et étant considérées comme « propres » du point de vue de la réforme RAMEAU feront l’objet de produits d’accompagnement à cette occasion.
Des données qui s'améliorent... et qui se dégradent
Du côté du contenu des notices, la migration des données dans Noemi, et la mise en place d’une migration retour pourront avoir des effets autant positifs que négatifs.
La migration des données a été perçue par la BnF comme une occasion d’assainir ses données, partout où elle le pouvait. Le fait même de passer à un modèle entité relation permet d’unifier et d’harmoniser certaines données, qui se trouveront mises en commun au niveau œuvre ou expression de l'arbre OEMI.
Parmi les exemples d'améliorations, l'utilisation des zones UNIMARC B 701, 702 et 703 devrait être plus cohérente et homogène. Au moment de la migration, les codes fonction ont été utilisés pour répartir les liens aux autorités de type PEP et ORG entre les niveaux œuvre, expression, manifestation voire item de l’arbre ; ils seront au retour affectés plus facilement à la bonne zone.
En revanche, certaines données subiront une dégradation : c’est en particulier de cas des zones d’indexation. En effet, un certain nombre des notices d’autorité vont, comme nous l’avons vu précédemment, changer de nature à la faveur de la migration. Il a cependant été impossible de répercuter cela dans le choix des étiquettes utilisées par la zone d’indexation, qui dépend de la nature de l’élément d’entrée. Ce problème sera corrigé à terme, mais ces incohérences devraient perdurer un certain temps. Enfin, le processus de migration retour, et en particulier les questions de grappage, pourraient entraîner dans certains cas des incohérences entre la forme du point d’accès d’une autorité, et la façon dont elle est répercutée dans les entités qui s’y lient.